A l’occasion des 21 ans de l’association Country Line Dance de Holtzheim, nous sommes allés à la rencontre de Thierry et Céline Schmitt qui gèrent de main de maître leur association. Une interview à travers laquelle on découvre qui ils sont réellement et d’où vient leur passion commune pour la country…
Bonjour ! Pouvez-vous vous présenter rapidement ?
Nous sommes Thierry et Céline Schmitt, des chorégraphes et instructeurs de danse country connus. Ce n’était pas le cas il y a 21 ans. Nous avons d’abord appris à danser tout seul dans notre salon et en suivant les vidéos que l’on a pu se procurer aux Etats-Unis, on a fait notre petit chemin pendant ces 21 années et crée le CLDH (Country Line Dance Holtzheim), où l’on a pu exprimer notre passion entièrement avec mon épouse.
D’où vous est venue cette passion pour la country ?
La passion de la musique country vient d’une série télévisée qui, lorsque j’avais 5 ans, s’appelait « Abenteuer der Landstraße » (L’aventure au bout de la route). Ça racontait une histoire de camionneurs américains qui traversent les États-Unis et d’un épisode à l’autre, ils leur arrivaient des histoires. A 5 ans, quand je voulais reproduire les épisodes de cette série, il me manquait de la musique country, celle que les camionneurs écoutaient. Donc j’ai demandé à mes parents de m’acheter de la musique de camionneurs (je ne savais pas que ça s’appelait de la musique country à l’époque), et c’est comme ça que j’ai découvert cette musique avec des disques de Johnny Cash, Kenny Rogers,…
Je me suis aussi passionné pour ces camions américains. Un jour est arrivé à Strasbourg l’American Circus. Malheureusement, celui-ci venait d’Allemagne et le convoi a dû être bloqué sur pont de Kehl parce que les éléphants n’avaient pas de certificats sanitaires à jour.
J’ai donc vu ça à la télévision, et comme mon père était un ancien coureur automobile, on avait l’habitude d’aller à Hockenheim. Un jeudi après-midi, comme nous n’avions pas école à ce moment-là, j’ai pris le mini-vélo de ma grand-mère et je suis parti, en cachette, voir ces fameux camions « Peter Bilt » qui étaient stationnés sur le pont de Kehl. Je suis resté deux heures devant ces camions ornés de la fameuse bannière étoilée américaine. C’était en quelque sorte la série devant mes yeux, présentée à moi. Depuis, je suis resté fidèle à cette musique.
Après ça, j’ai rencontré mon épouse en 1982, avant de me marier l’année suivante. On n’avait jamais parlé de musique country jusque-là, car à l’époque cela faisait un peu « ringard » en pleine période disco. Au bout de 3 ans de mariage, en revenant de vacances du Sud de la France, j’ai craqué. Je me suis arrêté dans une station-service sur l’autoroute près d’Orange et j’ai racheté une cassette de musique country. C’est là que ma compagne me dit « Mais…t’aimes ça ? ». Alors je lui réponds « Oui j’adore ça, j’ai plein de disques à la maison mais je te l’ai jamais dit… ». Elle me dit alors « Non…c’est pas possible ! Moi aussi ! ». Elle avait les mêmes disques que moi à la maison ! Et depuis cette période-là, nous vivons cette passion ensemble.
Parlez-nous un peu de votre association. Comment celle-ci est-elle née? Depuis quand existe-t-elle? Combien de membres comptez-vous ?
Le CLDH a été créé car à l’époque on attendait que quelqu’un en créé une dans la région de Strasbourg, mais il n’y en n’avait pas. On a attendu pendant deux ans et puis finalement, nous nous sommes dit que si personne n’en fait une, on va le faire. Et c’est ainsi que le CLDH est né. On a démarré un mois de février. Au moins de juin, on avait déjà à peu près 120 membres. Il y avait donc une vraie demande dans la communauté urbaine de Strasbourg. Et en l’espace de deux ans, nous étions 450 membres. Mais cela devenait ingérable, car nous avions des répétitions à Koenigshoffen, à Holtzheim, à Oberschaeffolsheim,… Nous donnions des cours dans plein de villages. On a dû créer des postes de professeurs de danse pour pouvoir tous les assurer car il arrivait souvent d’avoir des cours le jeudi soir dans trois villages en même temps ! On a fini par réduire notre taille car soit on resté comme on était, soit on passait professionnel, ce qui n’était pas notre souhait. On a donc aidé beaucoup d’associations à se créer, comme par exemple celles à Vendenheim qui sont parmi les plus anciennes de la ville. Beaucoup d’associations ont vu le jour grâce à nous. On a élaboré les statuts, on n’a jamais pris part aux comités de direction, on les a juste aidé pendant les premières années de leur existence.
Aujourd’hui, on est revenu à une taille plus « humaine » car on tourne sur Holtzheim à une centaine de membres.
Est-il possible de rejoindre votre association sans aucune connaissance de la danse country ?
Oui bien sûr car maintenant nous avons l’œil pour détecter les problèmes chez les gens. Certains ont des problèmes de rythme, d’autres des problèmes physiques,… A chaque fois qu’il y a un problème pour s’exprimer dans la danse, il y a une solution. On a suffisamment formé de gens dans le monde pour pouvoir trouver la solution adaptée à chaque personne. Donc celles qui pourraient, semble-t-il, être dans des cas désespérés arriveront à danser chez nous parce qu’on prendra le temps de voir où est le problème et leur expliquer.
Tout le monde peut nous rejoindre ! La preuve, on a des personnes qui approchent les 80 ans, des jeunes également de 6,7 ou 8 ans. Chez des personnes d’un certain âge, des fois c’est plus difficile car il y a malheureusement des problèmes de mémoire, d’élasticité du corps, mais finalement on y arrive. Tout le monde y arrive !
Sur votre site vous dîtes qu’au départ il n’y avait que très peu d’associations dédiées à la country sur Strasbourg (voire pas du tout) et que vous n’étiez qu’une vingtaine de membres au départ. Comment expliquez-vous cette évolution ? Comment avez-vous réussi à développer et faire grandir votre association ?
Nous avons réussi à grandir car nous étions les seuls au début. Nous étions également les seuls à avoir des contacts permanents avec les États-Unis afin d’avoir des danses parfaitement originales. Internet a aussi beaucoup facilité les choses pour la création d’autres associations par la suite…
Si nous sommes toujours là 21 ans plus tard, c’est parce que nous avons foi dans ce que nous faisons. C’est parce que notre niveau d’enseignement et de danse a été reconnu. On est toujours là car on est resté fidèle à ces trois maitres mots que sont la convivialité, le fair-play et la tolérance. Ce sont des mots qui résument la mentalité et le mode de vie qui vont de pair avec cette musique.
Nous allons aussi bien enseigner la danse que cet art de vivre. Et aujourd’hui, avec la conjoncture actuelle, les gens ont besoin de ça aussi. Il n’y a pas que la danse. Il y aussi l’amitié, l’esprit de camaraderie et la tolérance. On n’a pas besoin de savoir ce que l’autre fait aujourd’hui dans la vie, on s’en fout. Pourquoi ne pas, le temps de deux heures, laisser tous ses problèmes dehors et passer un bon moment ensemble, peu importe ce qu’on est dans la vie. C’est quelque chose d’extraordinaire et c’est peut-être ce qui a fait la réussite du CLDH.
Toujours sur votre site, vous proposez d’enseigner près d’une centaine de danses ! Arrivez-vous à toutes les enseigner ou certaines sont plus populaires que d’autres et reviennent plus souvent ?
Le site n’a pas forcément été à mis à jour. En réalité, on est plus proche des 200 danses à l’heure actuelle. Mais c’est vrai que Céline et moi avons des dispositions pour accumuler un certain nombre de danses, même si 200 danses, on n’y arrive pas. Un être humain peut arriver à 120 danses maximum, mais il peut nous arriver d’en mélanger. Néanmoins, il nous suffit de quelques secondes pour se remettre en route et retomber sur nos pieds. Nous ne connaissons pas ces 200 danses sur le bout des doigts. En revanche, si l’on révise un tout petit peu en lisant ce qu’on appelle les step sheets (les feuilles de danse), alors ça revient très vite.
Quel est votre plus beau souvenir depuis toutes ces années ?
Mon plus beau souvenir ? C’est d’avoir entendu, alors que l’on ne s’y attendait pas, La Marseillaise sonner en notre honneur aux États-Unis. Ce qu’il faut savoir, c’est que tous les évènements aux États-Unis démarrent par l’hymne national américain. Les américains ont un profond respect pour leur hymne. Les chapeaux sont bas, les mains sont sur le cœur et le silence est d’or. Et puis à un moment donné, les speakers ont dit au public de garder le silence. Et d’un coup, il y a eu la Marseillaise. On ne s’y attendait pas, on n’a pas été prévenu. Les américains ont écouté notre hymne national, avec le même respect que pour le leur. On nous a alors tendu les micros et avec Céline, nous avons pu chanter la Marseillaise, aux larmes car comme on ne s’y attendait pas on a forcément été ému de cet honneur. Ce qui était surprenant, c’est que les américains qui étaient proches de nous ont pleuré avec nous. Ils ont ressenti notre émotion et cela a probablement été le plus beau souvenir qu’on ait eu. Aujourd’hui, en toute modestie, on peut presque savoir ce qu’un athlète aux Jeux Olympiques ressent quand il entend l’hymne national. On est fier d’être français à ce moment-là.
Quelles sont les prochains grands rendez-vous pour votre association ?
Le prochain grand rendez-vous, ce sera un déplacement aux États-Unis, notamment dans la ville de Houston, au Texas. Il y aura aussi un déplacement dans le Tennessee, à Nashville, une des capitales de la musique country. Ce sont là de grandes échéances qui sont importantes pour nous.
Souhaitez-vous rajouter quelque chose ?
Je dirais que finalement, on est profondément américain dans notre façon de danser. On est fiers d’être français malgré tout et pour ceux qui n’ont jamais été aux États-Unis, il n’y pas besoin d’y aller ! Ils peuvent venir ici, on parlera des États-Unis et on leur apprendra à danser comme là-bas. Si les gens qui viennent apprendre à danser chez nous vont un jour aux États-Unis, ils pourront très facilement danser avec les américains car ce qu’on fait ici, c’est comme là-bas.
Ce qu’on peut aussi rajouter, c’est que nous ne demandons jamais aux gens de venir s’inscrire ici. Ceux qui souhaitent voir, nous leur proposons de venir quand ils veulent, de venir essayer pendant 3 semaines sans être membre pour voir si la danse et l’ambiance leur conviennent. Il faut que les gens se sentent bien, c’est important.